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Joggings roses et têtes voilées au collège de Montigny-le-Bretonneux

coll__ge_musulman_1.jpg(Le Monde)- Dans l’allée goudronnée qui fait office de cour de récréation et de terrain de sport, huit garçons s’essayent au passage de relais sous les conseils d’un professeur de sport. Une grappe de filles assises dans un coin papotent, bâton de relais à la main. Des joggings roses et des queues de cheval se mêlent aux tenues islamiques : longues robes noires couvrant le corps pour certaines, voiles amplement déployés sur les cheveux et les épaules ou simple foulard pour d’autres. En ce début d’année scolaire, les élèves de 5e du nouveau « collège-lycée privé musulman » de Montigny-le-Bretonneux (Yvelines) font vivre à leur manière cet ancien bâtiment des impôts.

Niché dans une impasse, rien ne le distingue des immeubles de bureaux avoisinants. L’aménagement intérieur est sommaire mais fonctionnel et spacieux : deux salles de classe au mobilier cédé par des établissements voisins, un centre de documentation aux ouvrages hétéroclites, un espace réfectoire surdimensionné. Une grande salle sobrement agrémentée d’un tapis gris est dédiée à la prière ; on y range aussi les tables de ping-pong.

Avec ses deux classes, 6e et 5e, comptant respectivement 14 et 15 élèves, ce collège privé hors contrat se met sur les rangs pour rejoindre le petit cercle des établissements scolaires musulmans. S’engageant à suivre le programme de l’éducation nationale, gage d’une reconnaissance au bout de cinq ans, il ambitionne d’ouvrir à terme des classes de 4e et 3e.

Président de l’Institut de formation de Saint-Quentin en Yvelines, qui gère le collège, Slimane Bousanna, à l’origine du projet avec d’autres parents, énonce très clairement les objectifs : « Nous visons la réussite scolaire de chaque élève, le développement d’une conscience citoyenne et la transmission de valeurs éthiques puisées dans le terreau musulman. » Ravi de savoir son fils désormais « bien encadré », le père d’un élève témoigne : « En 6e, mon fils était dans une classe de 35 élèves ; s’il ne voulait pas travailler, c’était possible ! «  Là les parents déboursent de 120 à 240 euros par mois ; les frais d’inscription n’assurent qu’un quart du budget, qui mise sur le « mécénat indépendant ».

« Demande sociale »

Ici, la démarche ne constitue pas une réponse explicite à la loi de 2004 qui a interdit le port du voile à l’école. « Nous répondons à un besoin et à une demande sociale. Certains parents viennent pour éviter le secteur public, d’autres pour les valeurs musulmanes » , précise le président, un ingénieur de profession, lui-même « pur produit de l’enseignement public « .

La douzaine d’enseignants, tous de culture musulmane, sont passés ou non par les Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM). Bouchra, 34 ans, ex-vacataire de français, séduite par le « projet pédagogique » et accessoirement heureuse de pouvoir porter le voile islamique qu’elle devait retirer dans ses précédents postes, vient de l’enseignement catholique. Musulmane face à des enfants musulmans, elle assure qu’elle ne parlera pas de religion avec ses élèves. « J’ai le programme de l’éducation nationale à appliquer ! », explique-t-elle en guettant la sonnerie.

Pour Assia, docteur en mécanique des fluides, le collège musulman représente une opportunité professionnelle inespérée : elle y enseigne les mathématiques et la physique. A 33 ans, cette femme strictement voilée, et désireuse de conserver son foulard, faisait jusqu’à présent du soutien scolaire dans le cadre d’une association .

Recrutée par le bouche-à-oreille, l’équipe est au complet à l’exception de deux professeurs : celui d’éducation musicale, et ironie du sort, celui d’éducation musulmane ! « Nous avons du mal à trouver un candidat qui remplisse nos conditions », explique M. Bousanna en quête d’une personne ayant « une solide formation islamique, une expérience dans l’enseignement et une parfaite connaissance de la société française « . L’oiseau rare, visiblement.

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One comment

  1. L’absence de professeur d’éducation musicale n’est pas étonnant, compte tenu du fait que de nombreux courants musulmans orthodoxes proscrivent la pratique de la musique… (!)

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