Les églises évangéliques et pentecôtistes conjuguent un piétisme protestant ancien et une modernité religieuse qui réclame de l’émotionnel, de la ferveur, de l’affectif. Ces sont des « fast-religions » peu intellectuelles, qui privilégient l’expérience personnelle et ne se formalisent pas dans des matériaux théologiques et des rites trop compliqués. La Bible seule réunit des fidèles qui n’ont à se soumettre à aucun dogme ni appareil clérical.
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Ces groupes évangéliques regroupent les couches déshéritées et les couches plus éduquées et blanches de croyants qui ne supportent plus la sécheresse dogmatique des religions historiques, en particulier du catholicisme. Dérivé d’un protestantisme qui fut longtemps marginal en Amérique latine, nourri par des courants évangéliques venus des Etats-Unis, le premier pentecôtisme est né dans le sous-continent au début du XXe siècle, au Chili (Valparaiso), au nord du Mexique, au Brésil.
Très atomisées autour de « pasteurs » à la fois gourous et chefs d’entreprise, les Eglises du Christ et autres « assemblées de Dieu » ont créé une tradition : tradition millénariste dans l’Eglise de la lumière du monde au Mexique ou dans l’Eglise des Israélites du Pérou, présentées comme de nouveaux édens pour les populations déshéritées ; tradition du piétisme protestant fondé sur des pratiques de guérison et d’exorcisme. Le néopentecôtisme est apparu à partir des années 1980, et la figure la plus connue en est l’Eglise universelle du royaume de Dieu. L’éthique puritaine y est en recul. Dieu est celui qui assure un métier, guérit de la maladie, garantit contre le malheur, offre la sécurité contre la violence, développe une idéologie du succès social appelée « théologie de la prospérité » et contracte des alliances politiques. Ce néopentecôtisme est marqué par la prolifération de petites entreprises religieuses autonomes, qui se mettent de plus en plus en réseau autour de quelques télévangélistes connus.
Henri Tincq
Le monde 11.05.07