PARIS (AFP) – Des syndicats d’enseignants, des parents d’élèves ou encore la Ligue des droits de l’homme estiment que la « mixité à l’Ecole », voire la laïcité, sont mises en cause après l’adoption d’une disposition autorisant des enseignements « par regroupement d’élèves en fonction de leur sexe ».
Le 15 mai, le Parlement a adopté définitivement tout un arsenal de mesures censées combattre les discriminations et transposant en droit français cinq directives de l’Union européenne sur la lutte contre les discriminations.
Parmi elles, une disposition stipule que « le principe de non-discrimination fondée sur le sexe (…) ne fait pas obstacle à l’organisation d’enseignements par regroupement d’élèves en fonction de leur sexe ».
Lors du vote ultime au Sénat, les socialistes et les communistes avaient dénoncé cette disposition, craignant une remise en cause de la mixité à l’école.
Jeudi, la FSU a exigé le retrait de cette disposition, y voyant « une grave remise en cause de la loi Haby (1975, ndlr), qui marquait le long chemin vers l’égalité dans la scolarisation des filles et des garçons » et une « atteinte au principe de laïcité ».
« C’est un article de loi très dangereux, car le but de l’Ecole, et de la laïcité, c’est aussi d’apprendre à vivre ensemble », a affirmé la FCPE (première fédération de parents d’élèves du public) à l’AFP, précisant qu’elle allait envoyer un courrier au ministre Xavier Darcos pour savoir de quelle manière il comptait appliquer cet article.
La Peep (deuxième fédération du public), s’est dite « surprise » d’une telle disposition, car les cas de non-mixité « étaient jusqu’ici très bien gérés par les enseignants ».
La Ligue des droits de l’homme s’est indignée : « Prétendre protéger les filles par le retour au passé et par la ségrégation est absurde et inacceptable ».
De son côté, le Sgen-CFDT, sans vouloir « sonner le tocsin », s’est tout de même dit « inquiet » d’une « régression » qui crée un « climat déplaisant », se demandant ce que le gouvernement « avait comme idée derrière la tête ».
Pour SE-Unsa, qui a étudié les conséquences juridiques de l’article, il ne devrait toutefois pas y avoir de répercussions pour l’enseignement public et l’enseignement privé sous contrat.
Pour autant, « il n’y avait aucune nécessité de traduire la directive européenne par cet article », a-t-il dit, jugeant que « le gouvernement a cédé à la pression du privé sous contrat ».
De son côté, le ministère s’est voulu rassurant : « Le principe organisateur de l’enseignement dans les établissements publics reste celui de la mixité », a-t-il affirmé.
« Limité dans sa portée, cet article ne fait que rappeler un état du droit antérieur », a-t-il ajouté, citant deux cas où les enseignements non mixtes sont permis : certains cours d’EPS (la piscine par exemple, pour des raisons de performances différentes selon les sexes) et l’enseignement de la sexualité au collège, instauré par l’ancien ministre de l’Education, Jack Lang.
Dans ce dernier cas, cette séparation a permis, selon de nombreux observateurs, une expression plus libre des adolescents.
En outre, « la formulation juridique retenue – +ne fait pas obstacle à + -, exclut toute incitation à développer des enseignements séparés », affirme le ministère.
« Le gouvernement a créé par son erreur une situation complexe », avait reconnu le président de la commission des Affaires sociales du Sénat, Nicolas About (centriste).