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Des jihadistes peuvent gagner l’Europe sans se cacher parmi les migrants

(AFP- 24/05/15)-L’extrême droite agite le spectre de jihadistes s’infiltrant dans les embarcations de fortune chargées de migrants depuis la Libye, mais la menace semble minime comparée aux risques d’attentats commis par des Européens revenant de Syrie ou d’Irak, selon des experts.

Plusieurs dirigeants de l’extrême droite européenne, de la Ligue du Nord italienne à l’Ukip de Nigel Farage en Grande-Bretagne, ont agité le spectre de « terroristes » profitant de l’afflux sans précédent d’immigrés ralliant les rivages européens, pour se dissimuler parmi eux dans les bateaux.

L’arrestation en Italie d’un jeune Marocain, soupçonné d’être impliqué dans l’attentat du musée du Bardo en Tunisie et qui était arrivé en février sur une embarcation clandestine depuis la Libye, a fait enfler le débat, alors que les Européens se déchirent déjà sur la réponse à apporter à la crise des migrants.

Dimanche, un conseiller du gouvernement libyen a affirmait à la BBC que le groupe Etat islamique (EI), implanté en Libye, faisait embarquer des jihadistes vers l’Europe.

« L’un des problèmes est qu’il peut y avoir des combattants étrangers, qu’il peut y avoir des terroristes qui se cachent, se mêlent aux migrants », a admis lundi le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg.

Le phénomène est « impossible à prouver », estime Charlie Winter, chercheur au centre de réflexion Quilliam à Londres.

Mais « c’est une menace qui existe.Il y a au moins une déclaration de Daesh (acronyme arabe de l’EI, ndlr) en ce sens et la récente arrestation en Italie », relève Marc Pierini, ancien ambassadeur de l’UE en Libye et chercheur associé à l’institut Carnegie Europe.

« Il peut très facilement y avoir des infiltrations individuelles », explique-t-il. « Quand vous avez sauvé 800 personnes en mer, il faut après, trier soigneusement pour savoir +qui est qui?+ là-dedans, et ces gens n’ont évidemment aucun document d’identité ». « Une fois qu’ils sont dans la rue, ils sont dans (l’espace) Schengen » et peuvent circuler librement dans 22 des 28 pays de l’Union européenne, résume M. Pierini.

– Aucune infiltration confirmée –

« Ceci étant, ce n’est pas la plus grosse menace terroriste, puisque les attentats de 2014 et 2015 en Europe ont tous été perpétrés par des citoyens européens. C’est cette méthode qui change vraiment la donne », ajoute-t-il, rappelant qu’au moins 4.000 Européens ont rejoint les rangs de groupes jihadistes en Irak et en Syrie.

« Les récentes attaques au Canada, en France, au Danemark, aux Etats-Unis (…) émanaient d’individus agissant de leur propre chef, mais au nom de l’Etat islamique », fait valoir M. Winter. Pour lui, l’EI a d’autres « priorités », et notamment « consolider sa présence là où il s’est implanté. Il cherche donc à s’étendre à partir de ses bases en Libye ».

« La Commission européenne tient à souligner qu’il ne faut pas placer les demandeurs d’asile et les terroristes dans la même catégorie », a indiqué une porte-parole à l’AFP. « Aucun cas n’a été confirmé à ce stade », a-t-elle insisté.

« Cela détourne du vrai problème, à savoir que des gens meurent aujourd’hui » en tentant ces traversées désespérées, a regretté Andrew Stroehlein, de l’ONG Human Rights Watch. « La priorité de l’UE doit être de sauver des vies, d’augmenter les sauvetages. »

« Mettre un jihadiste confirmé, qui a combattu et s’est entraîné avec l’EI pendant des mois, voire des années, sur un bateau qui risque de couler (…) n’est pas une façon très efficace de l’envoyer en Europe », juge Christian Nelleman, directeur du centre de réflexion norvégien RHIPTO. Surtout que l’EI « a déjà des routes établies » pour faire revenir ses jihadistes au bercail.

« Cela ne veut pas dire que ça n’a pas lieu, mais c’est minime », ajoute-t-il. « En termes d’attaques terroristes imminentes, cela serait du gâchis. »

« Ce qui est bien plus dangereux, c’est que l’EI retire autant d’argent du trafic des migrants », affirme M. Nelleman, selon lequel l’organisation jihadiste pousse le cynisme jusqu’à attaquer des camps de réfugiés syriens au Liban et en Jordanie pour alimenter son « commerce Est-Ouest ».

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