PORT-AU-PRINCE (AFP) – L’écrivaine bangladaise Taslima Nasreen, menacée de mort, pourrait trouver asile aux Etats-Unis si Washington acceptait de prendre en charge le coût de sa sécurité, a déclaré à l’AFP à Port-au-Prince l’écrivain américain Russell Banks.
« J’ai pensé à lui proposer notre soutien, mais nous sommes une organisation privée et nous n’avons pas les ressources (financières) pour assurer sa sécurité (…) Ceci ne peut être fait que par l’Etat », a expliqué M. Banks qui a fondé le Réseau nord-américain des villes d’asile (North american network of cities of asylum) dont il est le président.
Le réseau a pour objectif de trouver des villes d’accueil pour les écrivains menacés ou en exil.
Les islamistes qui la (Mme Nasreen) menacent peuvent la tuer n’importe où. Si elle vient aux Etats-Unis, elle sera toujours en danger » si elle n’est pas protégée, a estimé l’écrivain, rencontré à Port-au-Prince en marge du festival international de littérature Etonnants Voyageurs qui se déroule en Haïti jusque mardi soir.
« Les dépenses de sécurité sont si élevées qu’aucun organisme privé ne peut les prendre en charge (….) En Grande-Bretagne, ce sont les autorités britanniques qui ont assuré la sécurité de Salman Rushdie » quand il était menacé de mort à la suite d’une fatwa, a rappelé M. Banks.
« Si (l’écrivaine américaine et prix Nobel de littérature) Toni Morrison faisait l’objet d’une fatwa, je me demande si le gouvernement américain ferait quelque chose pour elle? », s’est interrogé Russel Banks, connu pour son opposition à l’administration Bush.
Mme Nasreen a vécu en exil entre l’Europe, les Etats-Unis et l’Inde depuis qu’elle a été menacée de mort par des islamistes au Bangladesh en 1994. Dans la dernière période, elle vivait à Calcutta où l’on parle le bengali comme au Bangladesh, avant d’en être chassée à la suite d’une violente manifestation islamiste contre sa présence. Elle peine depuis à trouver une ville d’accueil en Inde en raison de la pression de groupes islamistes.
Fondé en 2000, le Réseau présidé par Russell Banks accueille des écrivains dans plusieurs villes américaines, dont Las Vegas, Pittsburgh ou Iowa City.
Les écrivains accueillis y sont pris en charge pendant deux ans, le temps pour eux de trouver les moyens économiques et sociaux de s’insérer dans la société américaine.
Aux Etats-Unis, « nous avons une tradition d’accueil (des intellectuels) très forte. Mais avec la fin de la guerre froide, les gens l’ont oubliée. Nous essayons de réveiller cette tradition », a commenté l’écrivain américain.
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