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Les femmes sous liberté surveillée

Colloque international sur « les codes de la famille dans le monde musulman : perspectives comparatives » se poursuivent à Fès.

Comme à son habitude, la ville spirituelle se fait, encore une fois, réceptacle d’un débat des plus intéressants, mais qui suscite accord et désaccord parmi les intervenants. Car si les codes de la famille dans les communautés musulmanes puisent leurs articles dans les mêmes sources (textes sacrés), ils divergent dans la manière de les traiter et de les interpréter, en fonction des écoles et des dogmes en vigueur dans leurs pays.Mercredi dernier, chercheurs et homme de loi Marocains et Iraniens ont pris, tour à tour, la parole pour exposer les lois qu’ils appliquent concernant les considérations du genre. La « wilaya » (tutelle) et le consentement pour l’élaboration du mariage ainsi que la polygamie et la problématique du consentement ont été passées au crible par les intervenants.

Codifiée par la Moudawana, la tutelle, n’est pas complètement « tombée » Au Maroc. La nouveauté avec ce code, c’est qu’il a donné le choix à la fille de se passer de cette tutelle. Il est donc toujours en conformité avec l’Islam. En Iran, les choses ne se passent pas de la même manière. « Selon les chiites, le mariage d’un mineur est l’affaire du tuteur.

Sur ce point, il n’y a pas de divergence entre les ouléma. Les savants se sont basés, d’un commun accord, sur les paroles du Prophète. Par contre la divergence existe sur la capacité de la mère ou de la grand-mère maternelle à assurer cette tutelle. Certains savants sunnites contestent cette wilaya, alors que d’autres s’interrogent sur les finalités de ce refus », a affirmé Ghodratollah Ebrahimi Farani, de la faculté de droit, université Mofid, qui n’a pas oublié d’évoquer les limites de la responsabilité du tuteur.

« Le tuteur ne peut pas faire ce qu’il veut », a-t-il assuré. L’intérêt du mineur doit être au centre de cette responsabilité. Il peut donc refuser un mariage s’il estime qu’il ne répond pas à cet impératif.
Mais les sunnites ne sont pas d’accord sur ce point. Autre problématique posée par ce chercheur, le droit du gouverneur à la tutelle. Droit qui est affirmé, mais qui reste tout de même limité. Le « Hakim » peut remplacer la personne mineure mais à des conditions. En fait, que la tutelle soit exercée par un gouverneur ou par un autre membre de la famille, les imams contestent la liberté de la femme par peur des dérapages au niveau de la société. Pour eux, la femme doit être sous tutelle.
Néanmoins, en Iran, si aujourd’hui la femme refuse cette tutelle, le père doit respecter les désirs de sa fille.

Le contrat de mariage est conditionné par l’accord du père. Beaucoup de sunnites et de chiites pensent que cette tutelle n’est pas acceptée. La fille doit être indépendante.

Toujours dans le cadre de l’analyse des considérations du genre en Islam, le Dr Gholamreza Peyvandi, du département du droit, université Mofid, s’est penché sur l’étude de la polygamie et de la problématique du consentement. « La polygamie n’a pas été instaurée par l’Islam dans la péninsule arabe. Elle existait bien avant », a-t-il déclaré avant de se demander si l’Islam acceptait cette pratique et s’il était mieux de se contenter d’une seule femme au lieu d’en avoir plusieurs. Avant de répondre à ces questions, le conférencier a exhorté l’assistance à voir la réalité de nos sociétés et à tenir compte des besoins des hommes. « Il ne faut pas comprendre qu’un homme peut épouser plusieurs femmes pour assouvir ses besoins charnels », s’est-il promptement rattrapé.
Dans le Livre Sacré, il est dit que si l’homme craint de ne pas être juste, il doit renoncer à la polygamie. « L’homme doit être juste dans les dépenses et dans les droits du couple, et non en amour. Il s’agit donc d’une justice économique et physique et non sentimentale.
En posant ces conditions,

l’Islam essaie d’éliminer la culture polygamique, car elle est tellement difficile à
appliquer», affirme Dr Gholamreza Peyvandi.
Par ailleurs, si le deuxième mariage porte préjudice à la femme, il ne doit pas être accepté. Ou encore si la femme refuse de partager son homme avec une autre, elle peut l’exiger dans le contrat de mariage, quoique certains exégètes lui refusent ce droit.
Pour résoudre cette problématique, certains gouvernements islamiques ont mis des conditions à son application. Il s’agit, notamment de la nécessité d’avoir l’autorisation de la première femme, comme c’est le cas au Maroc.

Mariage des enfants !

Selon la loi iranienne, les garçons ont le droit de se marier à partir de 15 ans alors que les filles peuvent convoler en juste noce à partir de 13 ans. Cet âge est contesté dans ce pays. Pour les sunnites, une personne reste mineure jusqu’à ce qu’elle se marie et pour la fille jusqu’à ce qu’elle perde sa virginité. Les chercheurs iraniens se demandent s’il est bien de se marier quand on est encore mineur, et si ce mariage devrait être valide. Ils s’interrogent également sur la possibilité d’annuler un mariage contracté sous tutelle, une fois que la personne atteint sa majorité. A ce propos, certains chiites pensent qu’il n’est pas possible de l’annuler parce qu’il a été contracté dans le respect des préceptes de l’Islam.

Alors que certains avancent que les garçons ont ce choix (parce qu’ils sont financièrement indépendants) mais pas les filles. Ce qui est inadmissible, aux yeux de beaucoup de penseurs. D’une manière globale, le mariage des enfants interpelle les théologiens et les chercheurs. Pour répondre aux questionnements qu’il suscite, certains reviennent aux sources de l’Islam. Selon le Prophète Sidna Mohammed, l’ultime finalité du mariage est le bien-être de la personne. Donc, pour qu’il soit acceptable, il faut qu’il soit positif. Aujourd’hui, les oulémas ne recommandent pas le mariage des enfants.

le matin (Maroc)- 14/12/2007
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